Le futur du train : sur de bons rails ? 🚆
Le roi du transport durable a-t-il un avenir devant lui ? C'est ce qu'on va voir dans ce nouveau dossier de Paradigme, consacré au futur du train.
Temps de lecture : de 10 à 15 minutes
🔍 Ce que tu vas découvrir aujourd’hui :
Une brève histoire du train
L’état du réseau ferroviaire actuel
Le vrai bilan carbone du train
A quoi ressemblera le secteur ferroviaire, en 2030…
… et en 2050
4 projets français qui méritent la lumière
Salut les Paradigmus (plus jamais je vous appelle comme ça, promis) ! 🤘
Je vous souhaite le meilleur en 2025. Des projets pros valorisants, de belles aventures persos et d’intenses moments de repos.
Première résolution : Paradigme reprend un rythme de publications régulier. De belles interviews sont prévues dans les prochaines semaines, en plus du reste.
Pour ce début d’année, je ne réinvente rien. Place à la suite de ma série de dossiers sur “Le futur de…”.
Après l’hôtellerie, le ski ou l’aviation, découvrons ce qui attend le transport ferroviaire.
🤓 De nombreux autres dossiers du tourisme sont en accès libre sur Paradigme.
Je vulgarise toutes les deux semaines des sujets actuels du travel et ses innovations technologiques (IA, tendances, outils, startups…)
Je compte sur toi pour partager ma newsletter et inviter tous les p’tits copains à s’inscrire 🫶
C’est quoi, ta relation au train ?
Perso, c’est un cocktail explosif de nostalgie, d’amour et de haine. J’ai d’excellents souvenirs de trains de nuit en Asie, bercé par le roulis des wagons et réveillé par l’odeur du Phở au réveil. J’adore les TER qui parcourent la campagne française, lancés vers de petits villages et de grands espaces où peut galoper l’imaginaire.
Je ne connais aucun autre mode de transport qui m’offre autant de temps utile, adapté au travail, aux rencontres, aux loisirs ou aux rêvasseries.
D’un autre côté, le train a souvent été victime de mon courroux, embrasé par des retards et des annulations répétées (ligne 42 du TER, je ne t‘oublierai jamais, immonde engeance diabolique).
Plus le temps passe, plus j’ai l’impression que les débats se polarisent en deux clans : l’avion et le train. Récemment, l’annonce de l’ouverture Paris-Berlin a fait parler d’elle. D’un côté, ceux ravis d’avoir un moyen écolo de rejoindre le Berghain. De l’autre, les grands défenseurs de l’aviation : “trop lent, trop cher, aucun intérêt”.
N’en déplaisent aux seconds, le transport ferroviaire s’impose pour le moment comme la seule solution environnementalement viable de ces prochaines décennies. Pourtant, le trajet est semé d’embûches.
📜 Une brève histoire du train
Pour faire rouler un train, il faut ? Un chemin de fer, effectivement.
Étonnamment, les premiers représentants du genre datent du VIe siècle avant JC. À l’époque, les navires traversent l’isthme de Corinthe en portage, à l’aide de chariots tirés sur un chemin dallé, marqué de profondes rainures parallèles. On retrouve plus ou moins le même mécanisme sur les voies romaines, servant à guider les chariots dans les endroits jugés dangereux.
Bien plus tard, au milieu du XVIe siècle, les Britanniques mettent au point des rails en bois, utilisés pour transporter des matières premières en chariot hippomobile.
Il faudra attendre les années 1800 pour assister au développement des rails de fer et des locomotives à vapeur. On attribue le premier coup d’essai à Richard Trevithick, en 1804, au Pays de Galles. Manque de bol, le pauvre hère enchaîne les échecs, chacune de ses créations étant inadaptée au transport sur voies. Il meurt dans la solitude et la pauvreté.
Ambiance.
La première ligne fonctionnelle voit le jour deux décennies plus tard, en 1825. Elle relie Stockton à Darlington, en Angleterre. Tout s’emballe avec la révolution industrielle. L’industrialisation favorise la création de lignes privées et publiques qui sillonnent progressivement l’Europe, l’Amérique et l’Asie. Dès le début du XXe siècle, la majorité du réseau ferroviaire est électrifié. La vapeur s’évapore et les moteurs thermiques à diesel font leur apparition.
Après la Seconde Guerre mondiale, l’électrique s’impose. En 1964, le Shinkansen japonais ouvre la voie aux trains à grande vitesse, suivi par le TGV en 1981.
💌 Si tu apprécies ce que tu lis, prends quelques secondes pour cliquer sur le bouton “j’aime”, laisser un commentaire ou partager la newsletter autour de toi : ça m’aidera à être mieux référencé. 💌
🛤️ Et maintenant ? L’état du réseau ferroviaire (France et Monde)
Plus de 5M de voyageurs et 250K tonnes de marchandises circulent quotidiennement sur 28 000 km de lignes, dont 3.6K km dédiés au transport de marchandises (source : SNCF)
En France, le transport ferroviaire représente 102 milliards de pkm-kilomètres (l’unité correspond au transport d’un passager sur une distance d’un kilomètre. Ex : Si un train transporte 100 passagers sur une distance de 50 km, cela représente : 100 × 50 = 5 000 pkm), soit 54 % du transport collectif. Au niveau international, on parle de 2470 milliards de pkm, dont 72% en Asie. (Source : UIC)
Les États-Unis totalisent le plus grand nombre de km de voies ferrées (293K), malgré une fréquentation publique très faible, largement destinée au fret. Dans le top 5, on retrouve successivement les USA, la Chine, la Russie, le Canada et l’Inde. La France arrive en 10ᵉ position (un beau score, en comparaison de la superficie). (Source : UIC)
15 000 trains SNCF circulent quotidiennement en France et en Europe. (Source : SNCF)
Une vingtaine de compagnies circulent, dont près de la moitié est exploitée par le groupe SNCF. Les autres sont partagées entre Trenitalia France, Renfe, Le Train, Stretto, Eurostar, la Deutsche Bahn ou encore Transdev.
🌱 Le vrai bilan carbone du train
Évidemment, si le débat de la mobilité se cristallise autour du secteur ferroviaire, c’est en partie grâce à sa très faible émission de GES (gaz à effet de serre).
En nous basant sur les données de l’ADEME :
La fabrication, la maintenance et l’utilisation d’un TGV représentent au total 3.5g CO2e par pkm, contre 7.5g CO2e par pkm pour un Intercités, 108g CO2e par pkm pour une voiture thermique ou 260g CO2e par pkm pour l’avion => source : BPI France
En clair, pour une distance de 300 km, un TGV émet en moyenne 0.88 kg CO2e par passager (contre 77.6 pour l’avion, soit 88x moins) => source : ADEME
Selon les données relevées par l’équipe de Bon Pote, intégrant les coûts structurels et le taux de remplissage des trains, le train reste l’option la plus viable. Sur un Paris-Toulouse, le TGV s’en sort avec les honneurs. Il faudrait qu’il soit 56x moins rempli qu’un avion pour être moins viable, d’un point de vue environnemental.
La durabilité du train repose sur des éléments tangibles :
Leur capacité de transport, jusqu’à 1268 passagers par trajet en Ouigo
Un mix électrique français parmi les plus bas carbone du monde
Un tracé des lignes optimisé pour une faible consommation d’électricité
Une propulsion douce et continue (inversement à un avion au décollage)
🪄 À quoi ressemblera le train français en 2030 ?
Maintenant que les tenants et aboutissants du transport ferroviaire sont un peu plus clairs, étudions les principales tendances qui se dégagent d’ici à 5 ans.
Le TGV M
C’est le petit nouveau de la SNCF. Il est censé voir le jour dès l’été 2025. Annoncé pour rester opérationnel pendant 50 ans, il est (encore et toujours) fabriqué par Alstom. Objectif durabilité avec une diminution de 32 % de la totalité du bilan carbone de chaque trajet, en plus d’une construction quasiment intégralement (97 %) réalisée à partir de matériaux recyclables.
Totalement modulaire (d’où son nom), il permet de transporter jusqu’à 740 passagers dans des espaces convertibles. Il serait possible d’y ajouter ou de supprimer des espaces pour vélos, de transformer des secondes classes en première (et vice-versa), en plus d’être full accessibles aux voyageurs PMR.
Côté technologie, le TGV M s’appuie sur de la maintenance préventive et sur une expérience utilisateur largement optimisée avec une connectivité accrue. Il paraît même que le Wi-Fi sera accessible à bord…
Les trains à sustentation magnétique
On les connaît mieux sous leur p’tit nom de soirée : les Maglev. Ces incroyables prouesses d’ingénierie flottent sur les voies, sans aucun contact mécanique.
Comment ça flotte ? Par sustentation magnétique, un principe de répulsion et d’attraction généré par des électroaimants permettant au bestiau métallique de léviter à quelques centimètres au-dessus du sol.
Comment ça avance ? Grâce à un moteur linéaire installé sur la voie ou dans le train qui génère des champs magnétiques alternatifs, permettant de faire avancer ou de tirer le train.
Les avantages sont multiples :
La vitesse : on parle ici de records à plus de 600 km/h.
Le confort : ciao les vibrations et les soubresauts
La longévité : peu de frais d’entretien et une faible usure
Leur efficacité énergétique : plus efficaces que des avions sur des distances inférieures à 1000 kilomètres
Les inconvénients aussi :
Le coût : les infrastructures et les rames coûtent extrêmement chères.
Le bilan carbone des installations : près de 1000 tonnes de CO2 par kilomètre de voie
La compatibilité : imaginez remplacer tous les chemins de fer français par des voies adaptées
Actuellement, on en compte très peu dans le monde, le plus connu étant celui reliant l’aéroport de Shanghai au centre-ville. D'ici à 2035, la Chine devrait se doter de plusieurs Maglev, reliant notamment la ville de Canton à Pékin en 3h30 (contre 7h30 aujourd’hui).
L’Hyperloop, ce projet qui déraille
Alors Elon, on la ramène plus ? Déjà douze ans qu’on parle de l’Hyperloop, et toujours rien. Sur le papier, le projet faisait rêver : on reprenait les codes du Maglev, que l’on compressait dans des capsules pressurisées permettant d’atteindre des vitesses jusqu’à 1200 km/h.
Finalement, les entreprises ont jeté l’éponge les unes après les autres. Après l’aveu d’échec d’Hyperloop One, la plus avancée du game, c’est au tour de sa petite sœur toulousaine - Hyperloop TT - de fermer ses portes. Pour la petite histoire, le premier essai de l’Hyperloop s’est déroulé en grandes pompes sur un terrain militaire. Vitesse atteinte ? 172 km/h.
Dommage.
Dans l’ombre, des acteurs continuent de plancher sur le sujet. C’est notamment le cas des Canadiens TransPod et de leur projet à 18 milliards de dollars. Il est censé être accessible au grand public à compter de 2035. Mouais.
La multiplication des trains de nuit
Si j’évoquais l’ouverture de la ligne Paris-Berlin en introduction, c’est en fait tout le réseau qui va la jouer noctambule.
En 2025, plus de 70 destinations sont accessibles en train de nuit en France, via 7 lignes principales. D’ici à 2030, 10 nouvelles lignes devraient voir le jour, dont Paris-Tarbes, Bordeaux-Nice, Metz-Nice-Bordeaux ou Paris-Clermont-Ferrand/Toulouse/Albi.
Tous ces projets restent hypothétiques, tant le budget requis est important. Un coût qui fait progressivement reculer l’Etat, de moins en moins confiant sur sa capacité à investir.
Si tu veux tout savoir des trains de nuit, je t’invite à consulter le guide ultra-complet concocté par Mollow (dont je parle un peu plus bas).
😎 Ton avis m’intéresse. Fais-valoir ton point de vue :
Le renforcement du fret
Le transport routier représente une partie écrasante du transport de marchandises. Côté émissions de gaz à effet de serre et congestion des voies routières, c’est pas jojo.
Pourtant, près de 80% du fret était attribué au train, un siècle plus tôt. Un constat qui pousse la France à revoir son plan d’action pour doubler le transport de marchandises par voie ferrée d’ici à 2030, comme prévu par la loi Climat et Résilience de 2021.
Une utopie qui se gausse des problèmes logistiques : où trouver des voies qui n’existent pas, ou existantes mais largement privilégiées pour le transport de passagers ? Reste aussi à trouver suffisamment de financement, dans un marché largement favorable au transport routier.
🔮 Et en 2050 ?
Cette fois, on s’éloigne un peu des probabilités (même si certains projets sont déjà déployés) pour ressortir la boule de cristal :
Expérience passager optimisée
Votre train à destination de Lisbonne part dans 4 minutes. Pas de stress, la reconnaissance biométrique facilite votre installation, sans billet ni contrôle.
Vous prenez place dans un fauteuil qui s’adapte instantanément à votre morphologie, tandis qu’un androïde apporte votre boisson préférée, précommandée à l’avance sur votre iPhone 28.
En guise de fenêtre, un écran interactif permet d’observer le paysage, de lire votre série du moment ou d’intégrer n’importe quel affichage en réalité augmentée.
💌 Pour prospérer, Paradigme a besoin d’amour. Je compte sur toi 💌
A plus de 1000km/h, le Maglev 2.5 s’élance à travers la France. Prévoyez 30 minutes pour faire un tour dans la voiture fitness, intégralement constituée de tapis de courses installés face à des baies vitrées panoramiques.
De retour à votre siège, l’assistant virtuel vous délivre un guide de voyage clé en main, adapté à vos préférences. Moins de deux heures plus tard, vous êtes à destination.
Trains à hydrogène, la formule magique ?
Zéro émission, pollution sonore réduite, autonomie de 1000 kilomètres, facilité de déploiement sur des lignes encore non électrifiées… difficile de résister aux promesses de l’hydrogène.
Si je le sujet de l’hydrogène t’intéresse, je t’invite à consulter cet article sur le futur de l’aviation :
Son attractivité a conduit à de premières tentatives en Europe, comme en Autriche et même en France, avec l’arrivée de 12 trains Régiolis H2 dans 4 de nos régions, en 2026.
En attendant, les premiers essais sont loin d’être concluants. Les 14 trains à hydrogène Alstom, déployés en Allemagne en 2022, ont fini par être retirés du marché, jugés beaucoup trop cher. Du moins, le temps de fiabiliser la technologie.
IA par ci, l’IA par là
Maintenance prédictive, trains autonomes, gestion des flux de trafic et des aiguillages, optimisation des itinéraires, prise en compte des aléas météos… l’IA va largement contribuer à améliorer la fiabilité du transport ferroviaire à travers le monde entier. Et encore, je ne parle ici que des solutions logistiques.
D’ailleurs, de nombreux opérateurs ont déjà recours aux solutions d’intelligence artificielle. La SNCF est une pionnière du secteur avec sa filiale SCNF Connect & Tech, tout comme la Deutsche Bahn qui a déjà parié sur l’autonomisation de ses lignes de train.
Résilience climatique
De nos jours, un RER reste en gare quand il neige quelques millimètres. Alors, imaginez en plein scénario catastrophe.
Désolé de plomber l’ambiance, mais il y a peu de chances que l’on parle encore de neige à Paris, en 2050. En revanche, dans les autres régions du monde et même chez nous, les catastrophes naturelles et autres dérèglements climatiques iront… bon train.
Les réseaux ferroviaires devront se préparer à circuler dans des environnements hostiles. Ils relieront des régions isolées grâce à des infrastructures adaptées à des conditions extrêmes, comme des incendies, des inondations ou des tempêtes soudaines. Vous y croyez ?
👏 4 initiatives et entreprises à retenir autour du train :
Railenium : Railenium est l'Institut de Recherche Technologique (IRT) français dédié au secteur ferroviaire. Parmi les innovations très attendues, on retrouve TELLi et DRAISY. D’une capacité respective de 70 et 30 places, ils feront office de tramways des zones rurales, propulsés à l’électricité verte et à l’IA.
Mollow : lancée en 2023, Mollow est devenue l’une des références françaises du voyage intermodal. Itinéraires, conseils, bons plans… c’est l’allié idéal des séjours responsables en France et en Europe.
Hourrail : exclusivement dédié au train, Hourrail donne toutes les clés pour organiser un rail-trip inoubliable dans le monde entier. Direction la Laponie, Taïwan, la Roumanie, la Thaïlande et toute la France, à l’aide d’itinéraires détaillés qui démontrent que le trajet est une grande part du voyage.
Le Train : l’initiative défraie la chronique depuis 2019. La première ligne privée de TGV devrait se mettre en route aux alentours de 2027, d’abord à destination des villes de l’Ouest de la France, de Rennes à Arcachon en passant par Nantes, Angoulême ou Tours. Au programme : des voitures conviviales, connectées et des liaisons intra-régionales facilitées.
Bon, j’aurais pu encore tartiner un sacré paquet d’informations sur le secteur ferroviaire. Disons que ce dossier donne une bonne vue d’ensemble.
Si tu es un expert du secteur ferroviaire et que tu souhaites compléter ce numéro de Paradigme, ma porte t’est grande ouverte.
En attendant, merci à tous d’avoir démarré 2025 à mes côtés.
On se retrouve dans deux semaines pour une sélection d’actus qui ont marqué le tourisme en janvier, avant de découvrir mes prochains invités !
D’ici là, prenez soin de vous,
Théo